Longtemps dans l’ombre de Lavaux, la région de Morges est parvenue en quelques années à gagner en visibilité sur la carte du tourisme romand, grâce à un positionnement réussi sur le «Slow Tourisme». Acteur central de cette stratégie, l’ARCAM (Association de la Région Cossonay- Aubonne-Morges) dispose de leviers financiers non négligeables qui ne demandent qu’à être investis dans le développement de projets touristiques et hôteliers, dès lors qu’ils correspondent aux objectifs d’un tourisme durable, qualitatif, de séjour, avec création de valeur ajoutée.
Mais aussi surprenant que cela puisse paraître, très peu de porteurs de projets répondent à l’appel. Ce phénomène n'a rien de spécifique à la région morgienne et s'observe aussi pour les fonds Innotour à l'échelle romande.
«Rien qu’au niveau fédéral, sur le site de la plateforme de développement régional regiosuisse, vous avez plus de 30 possibilités de financement en fonction du thème du projet et de la région géographique concernée. Le premier frein, c’est donc de ne pas savoir que l’information existe. Ensuite, il faut trouver ‹la bonne tirelire›. Et accessoirement, le troisième frein est constitué par les dossiers à remplir et les contrôles qui vont avec. Certains ne veulent pas ou sont découragés d’avance», explique Véronique Hermanjat, déléguée Tourisme de l’ARCAM et cheffe du projet «Slow Tourisme» depuis 2018. «Mais il faut bien comprendre que si la personne ne demande pas d’aides externes au moment de la phase initiale de son projet, nous ne pourrons plus intervenir si elle rencontre des difficultés un ou deux ans plus tard. Je dis donc aux porteurs de projets de venir nous voir le plus tôt possible», insiste Véronique Hermanjat, bien consciente du travail de communication qui reste à accomplir.
Tous les cas de figure sont envisageables. Qu’il s’agisse juste d’une idée sur le papier ou d’un business model avec des sources de financement déjà acquises, les associations régionales vaudoises interviennent en amont pour orienter les porteurs de projets vers les bons outils. Cela peut concerner aussi bien des projets culturels que des start-up impliquées dans la mobilité douce. «Nous n’avons ni plafond, ni plancher. On peut demander 1000 francs comme 1 million, par contre cela reste toujours proportionnel au budget global», dit Véronique Hermanjat.
«Communiquer sur des exemples concrets de projets»
Prévue pour octobre 2021, l’exposition «Nostalgies» organisée par le musée Alexis Forel a ainsi été appuyée par un financement de l’ARCAM, à travers le Fonds d’équipement touristique de Morges (FEM). «Nous travaillons avec l'ARCAM depuis une dizaine d’années. Notre offre et celles des autres musées de Morges participent à l’attraction culturelle de la région. Mais je ne suis pas sûr que les milieux de la culture en général soient au courant des financements possibles de leurs activités», avance Yvan Schwab, directeur du musée.
Dans un autre registre, l’entreprise eqlosion conseille les PME et les collectivités sur les questions de transition vers une économie durable. Dans le cadre du Climathon 2019, l’entreprise a soumis un projet à l’ARCAM, qui en a assuré l’ingénierie financière en collaboration avec le canton de Vaud. «Je vois beaucoup de personnes qui n’ont pas le réflexe de se tourner vers ce genre de financement. Cette absence de connaissances sur les aides existantes est liée à la surcharge de travail, au manque de temps et à la complexité croissante du métier de dirigeant d’entreprise», souligne Yves Loerincik, fondateur et président d’eqlosion, reconnaissant qu’à ce jour il ne compte pas d’hôteliers ou de prestataires touristiques parmi ses clients. «C’est très compliqué pour eux, car ils doivent en permanence gérer l’opérationnel. Je pense qu’il faut communiquer sur des exemples concrets de projets déjà en place», propose Yves Loerincik.
Possibilités de prêts à taux zéro et d'aides à fonds perdus
En 2019, 48 projets liés au tourisme ont reçu un financement du canton de Vaud. Parmi eux, 44 ont bénéficié d'aides à fonds perdus pour un montant total de 16 139 170 francs, répartis entre l'Etat de Vaud et la Confédération. «Nous devons encore améliorer la communication des associations régionales de développement économique et du Service de la promotion de l'économie. A terme, nous souhaitons mettre en place, avec les régions, une structure d’appel de projets à l’échelle cantonale, avec possibilités de coaching pour les entrepreneurs», explique Sandra Mordasini, cheffe de projet Tourisme au Département de l'économie, de l'innovation et du sport du canton de Vaud, constatant elle aussi un manque d’informations.
Un dernier aspect, et non des moindres, concerne la fierté de certains de ne pas être redevables ou encore l’appréhension, bien compréhensible, de ne pas vouloir contracter de dettes. «Mais peu de gens savent qu’avec un bon projet, ils peuvent notamment prétendre à des aides à fonds perdus», insiste Véronique Hermanjat.