«Je ne boirai jamais du vin dans un verre en plastique!» La voix chantante d’Elisabeth Pasquier charriait la garrigue et le chant des grillons du Château Mercier, à l’Hôtel de Ville de Sierre, où elle esquissait parfois quelques pas de danse au son du saxophone en fin de soirée. Je relis son dernier message dans ma boîte électronique, tellement vivant: «J’étais contente de te revoir et encore plus contente que tu sois allé à la cave des Landions, c’est très valorisant pour notre travail quand il débouche sur des visites.»

On se rappelle de son accueil à Sierre, les vendredis soirs de Vinea. De ces vins dégustés ensemble, notamment cette Petite Arvine d’Ismaël Bonvin, pour accompagner une raclette de Bagnes servie par un géant. Elle veillait à l’organisation de l’évènement dans ses moindres détails, savait calmer les fêtards les plus turbulents, rassurer une journaliste américaine très délicate. Elle restera pour moi une femme d’émotion et de séduction qui partait dans de grands rires truculents. Elle raffolait de bonnes adresses dans les villes européennes, de cave secrète à fado, de chefs d’œuvre de la peinture dissimulés dans une église.

Elisabeth Pasquier connaissait mon talon d’Achille et mes envolées lyriques, me taquinait en me reparlant du regard de braise d’une vigneronne du Tessin. M’encourageait à improviser un poème de mots collés dans les salons feutrés du Terminus, chez Didier de Courten. Elle offrait des leçons de storytelling au naturel: «Les grandes Arvines me ramènent vers les vagues de l’océan de mon enfance, avec ce sel des Landes qu’elles laissent sur le palais.»Son visage lumineux reste lié à celui de ses complices son ancien président François Murisier, ses fidèles collaboratrices Emeline Zuffrey et Nicole Genoud, pour créer ensemble cette atmosphère de simplicité et de plaisir qui baigne Vinea.

Elisabeth Pasquier poussait le vin dans ses derniers retranchements: «Au-delà d’être sec, moelleux ou étourdissant, il délie les langues, déstresse, révèle ce que l’on mange et trouble nos rapports amoureux.» Quand elle savait qu’on allait se retrouver bientôt elle s’exclamait: «Chouette!»