Inaugurée le 26 août dernier, la ligne de train des Transports publics fribourgeois (tpf) reliant Berne à Broc-Fabrique, siège de la fabrique de chocolat Cailler, marque la première étape d’un gigantesque projet touristique d’un montant de plus de 100 millions de francs. Le Parc du Chocolat Cailler, fruit d’une collaboration entre Nestlé Suisse, propriétaire de la marque Cailler, et de Jogne Invest SA, société rassemblant des investisseurs privés et des particuliers majoritairement originaires de Fribourg, a pour ambition de devenir dans les prochaines années une attraction touristique nationale, et même mondiale. Nestlé conservera les secteurs de fabrication et de distribution du chocolat, tandis que le parc sera la propriété de Jogne Invest SA, qui sera également en charge de son exploitation.
Actuellement, la Maison Cailler accueille à Broc plus de 400 000 personnes par an – un chiffre qui en fait l’un des sites les plus visités de Suisse, mais qui aux yeux des investisseurs reste encore très en deçà de son potentiel touristique. L’ouverture est prévue fin 2025, avec comme objectif un doublement du nombre de visiteurs dans les premières années, suivie d’une montée en puissance.
Une logique territoriale au service de toute la région
«A l’horizon de 10-15 ans, nous tablons sur 1 à 1,5 million de visiteurs par an. Lorsque l’on compare avec d’autres parcs à thème, ces chiffres sont réalistes», explique Olivier Quillet, président de l’association Gruyère-Chocolat. «Suisse Tourisme est très intéressé à désengorger Lucerne et Interlaken, en créant un pôle touristique fort en Suisse romande. Le Parc Cailler pourrait tout à fait jouer ce rôle», ajoute Olivier Quillet.
Au-delà de l'intérêt purement entrepreneurial et financier, l’aspect le plus intéressant de cette initiative est sans doute sa logique territoriale. A ce jour, le canton de Fribourg, malgré la douceur de ses paysages préalpins et ses nombreux atouts touristiques, souffre d'une situation géographique qui en fait une région de passage entre Suisse alémanique et romande. Avec 473 639 nuitées enregistrées en 2022, Fribourg se place en dernière position des 13 régions touristiques suisses.
«Nous voulons vraiment servir de point d’ancrage pour toute la région. Beaucoup trop de voyageurs ne font que traverser la Gruyère. Avec ce projet et son infrastructure hôtelière attenante, nous voulons inciter les touristes à rester plusieurs jours sur place et rayonner ensuite à partir de là dans la région», souligne Olivier Quillet.
Un complexe hôtelier pour accueillir les visiteurs du parc
Actuellement, le temps moyen de visite de la Maison Cailler est d’une heure et demie. L’ensemble des attractions du nouveau parc devrait faire passer cette durée à 4 ou 6 heures. D’où les infrastructures hôtelières qui seront prévues sur place, même si actuellement, le positionnement du ou des hôtels n'est pas encore arrêté. Entre le haut de gamme, qui s'adresserait plutôt à des clients en provenance du Moyen-Orient, le 3 étoiles familial ou même une auberge de jeunesse pour accueillir des groupes, tout est encore ouvert.
«Avec ce projet, nous allons jouer dans une autre catégorie», se réjouit Pierre-Alain Morard, directeur de l’Union fribourgeoise du tourisme. «La nouvelle ligne Berne – Broc-Fabrique des tpf va par ailleurs clairement changer les habitudes de nos hôtes», ajoute-t-il, soulignant le rôle du train dans la mobilité douce.
En période de week-end estival, la Maison Cailler accueille environ 2000 personnes. «Ce train est une chance immense», insiste Daniel Bulliard, président de Jogne Invest SA. «Nous allons mettre en place des offres très attractives pour encourager les visiteurs à se déplacer au maximum avec ce moyen de locomotion».
Dans cet esprit, le parc devrait être alimenté à 100% en énergies renouvelables. L’usine hydroélectrique d’Electrobroc située à moins d’un kilomètre fournira l’essentiel de l'électricité, à laquelle s’ajouteront des installations de panneaux photovoltaïques et de chauffage à bois à distance.
Une ferme expérimentale, une serre tropicale
Quant au contenu, l’ensemble proposera sur 30 000 m² une vingtaine d’activités et d’espaces thématiques, mettant en valeur l’héritage historique de la chocolaterie Cailler. Fondée en 1898, elle est la plus ancienne fabrique de chocolat du monde encore en activité. «On a là matière à raconter une très belle histoire», s'enthousiasme Olivier Quillet.
Plusieurs constructions-clés vont modeler le visage du nouveau parc. Tout d’abord la rénovation des ateliers mécaniques de la fabrique, désaffectés depuis des dizaines d’années et qui formeront le cœur d’un futur village du chocolat. Ensuite, une serre tropicale accueillera de véritables cacaoyers et présentera aux visiteurs l’aspect botanique de la culture du cacao.
Sur le plan architectural, une galerie coursive de plus de 1000 m² est prévue le long des toits de la fabrique, dessinant ainsi un parcours en hauteur pour donner aux touristes une vue plongeante sur l’ensemble des activités de l’usine. «Cailler est la rencontre entre le savoir industriel de la Suisse et le lait produit par 57 exploitations fribourgeoises», rappelle Daniel Bulliard. Hommage à l'agriculture locale, une ferme expérimentale donnera à voir la production de lait, ancrant un peu plus encore le projet dans le paysage gruérien.
Canton de Fribourg
2500 km de pistes VTT balisées d'ici 2025
Fribourg met en action un plan VTT cantonal et veut accompagner les prestataires touristiques pour développer des offres liées au E-bike.
Baptisé «Bike-in FR25» et lancé à l’été 2020, le plan cantonal VTT fribourgeois est entré cette année dans sa phase opérationnelle. Réunissant vététistes, services de la faune et de la nature, acteurs du tourisme et de l’hôtellerie, sociétés de remontées mécaniques, etc., des groupes de travail ont été mis en place dans chaque district du canton, dans le but de proposer 2500 km d’itinéraires officiels balisés d’ici fin 2025.
Les responsables fribourgeois le reconnaissent volontiers: ils ont dix ans de retard sur des régions comme les Grisons, le Tessin ou le Valais dans le développement de l’offre touristique liée à l’explosion du VTT électrique. Actuellement, le canton de Fribourg ne représente que 1,3% de l’ensemble des journées VTT effectuées en Suisse. Peu importe, grâce à ce plan cantonal, Fribourg est bien décidé à encourager le VTT à tous les niveaux et surtout à valoriser cette pratique sur le plan touristique.
«Le potentiel économique est vraiment important. Une région comme Lenzerheide a misé sur le VTT en été, un pari qui s’est avéré gagnant avec une augmentation du taux d’occupation des hébergements et des créations d’emplois», fait remarquer Frédéric Perritaz, coordinateur du plan VTT du canton de Fribourg et vététiste de haut niveau. «Le potentiel à Fribourg est d’autant plus grand qu'en raison de son altitude moyenne, on peut y faire du VTT toute l’année.» Parallèlement au balisage de différents itinéraires VTT – familial, descente, enduro, all mountain –, le canton veut amener les prestataires touristiques, comme les hôtels ou les buvettes d’alpage, à s’équiper pour accueillir les VTT, en proposant à ces derniers des bornes de recharge. «L'e-bike s'adresse à un public de 7 à 77 ans, c’est là son intérêt majeur. On peut l’utiliser de façon sportive ou détente. C’est là-dessus que nous voulons communiquer, en soulignant le principe de la mobilité douce», conclut Frédéric Perritaz.