Séjourner à l’hôtel répond à différentes motivations. A minima, ce peut être le besoin d’un toit pour abriter son sommeil, l’espace de quelques heures. Ou d’un cocon pour de reposantes vacances. Ou encore d’un point de chute à partir duquel partir à la découverte d’une région. Deux étoiles, ici; trois, quatre ou cinq, là… Il y en a évidemment pour tous les goûts et pour toutes les bourses. Mais au-delà des nuitées, l’hôtel peut offrir une expérience de vie.
A Berlin, le Hollywood Media Hotel se donne des allures cinématographiques. De quoi piquer la curiosité des fans de la Berlinale. Les chambres portent le nom d’acteurs ou de films et sont décorées à leur image. Le minimum «syndical»… Car pour le rêve et le dépaysement, il y a nettement mieux. Le Sato Castle Hotel, à Taipei, par exemple, d’un kitsch hallucinant, où l’on peut dormir en compagnie d’un dragon, d’une volkswagen ou entouré de (fausses) araignées… Dans un tout autre registre, le Marina Bay Sands, à Singapour, se prévaut d’une piscine à débordement de 150 mètres de long sur son toit arboré, à 200 mètres du sol, avec vue panoramique sur la baie. «A once-in-a-lifetime experience» promet sa publicité. Comme expérience, c’est très fort aussi, mais c’est plus cher… Il n’y a pas de miracle. A hôtels d’exception, tarifs exceptionnels.
Le Kakslauttanen Artic Resort, en Laponie, offre ses chalets en rondins et ses igloos de verre pour admirer les aurores boréales. En haute saison, il en coûte 700 francs la nuit pour deux personnes. Pas si cher que cela? Mais le confort est sommaire. Situées dans un autre bâtiment, les douches sont communes. Au Burj al Arab Hôtel de Dubaï, auquel certains journalistes spécialisés accordent 7 étoiles (!), pas de douche commune. Les transferts de et pour l’aéroport se font en Rolls-Royce ou en hélicoptère (héliport sur le toit). Erigé sur une île artificielle du golfe persique, cet hôtel a la forme d’une aile géante. Et pratique des prix qui ne sont pas moins géants : grosso modo, de 2 000 à 12 000 francs la nuit. Mais déjeuner ou dîner attablé devant l’aquarium de 990 000 litres du restaurant Al Mahara ne s’oublie pas facilement.
Tout cela pour dire qu’un séjour à l’hôtel, fût-il bref pour éviter de trop faire chauffer la carte de crédit, peut représenter une expérience mémorable. L’hôtellerie helvétique bénéficie de la meilleure des réputations. Tradition, confort, service, gastronomie… Mais qu’on ne s’y trompe pas. Elle n’est pas en mal d’idées audacieuses, voire ébouriffantes. Comme en témoignent, entre autres, l’hôtel Palafitte à Neuchâtel dont les pavillons Rivage sont construits sur pilotis. Celui du Chetzeron, à Crans-Montana, l’ancienne gare d’arrivée de la télécabine transformée en hôtel de luxe serti de bois, d’ardoise et de verre, vue éblouissante à la clé. Ou celui du tout nouveau Ibis Style Madhouse, à Lausanne, dont les neuf chambres vont être décorées à la bombe à peinture par autant de graffeurs. Un paradis pour les adeptes du street art. Ou encore – last but not least – le 7132 de Vals dont l’architecture est signée par les célébrissimes Peter Zumthor, Tadao Ando, Thom Mayne et Kengo Kuma. Une des perles des alpes, assurément. Là aussi, un séjour offre comme un supplément de vie.
Chronique de Jean Pierre Pastori: Journaliste et écrivain. Ancien directeur du Château de Chillon et président de la Fondation Béjart Ballet Lausanne. [IMG 2]
Les chroniques du «cahier français» cèdent la plume à Jean Pierre Pastori et Anouck Weiss.