Selon une étude menée en 2018 par le World Travel and Tourism Council, près de 100 millions de nouveaux emplois devraient être créés d’ici les 10 prochaines années dans l’industrie hôtelière et touristique. Ce marché représente d’ores et déjà un emploi sur dix dans le monde. Pour faire face à cette croissance, l’industrie devra réussir à attirer des talents, sortant entre autres des meilleures écoles hôtelières, qui ont aujourd’hui souvent tendance à se tourner vers d’autres secteurs aux conditions de travail plus attrayantes.
Maintenant, une fois que ces chiffres ont parlé et alors que nous traversons une crise sans précédent dans le monde de l’hôtellerie, que reste-t-il de ces prévisions? Nous savons qu’il y a deux types d’entreprises: celles qui souffrent et celles qui vivent très bien ce nouveau paradigme. Alors il est impératif de nuancer la demande en personnel dans les années proches. Ce qui demeure, c’est que le Covid-19 sert d’accélérateur pour l’implémentation de nouveautés dans le digital, dans l’éducation, dans le contrôle des coûts… Tout cela contribue à revisiter nos façons de faire.
Outre une augmentation des salaires, il existe une multitude de façons d’attirer et de fidéliser des employés, mais il est important que chaque établissement trouve sa propre formule qui servira au mieux ses employés et sa culture d’entreprise.
La start-up Hotelswaps.com propose un programme audacieux d'échanges de chambres d'hôtels permettant aux propriétaires et exploitants d'hôtels d'échanger leurs chambres vacantes contre des séjours gratuits pour leurs employés. C'est une excellente idée car cela donne l’opportunité aux employés de découvrir des hôtels qu’ils ne pourraient peut-être pas se permettre de payer au prix fort et cela leur donne l'occasion de faire l'expérience directe d’une qualité du service et d'une expérience client. Enfin, cela permet de mettre à profit les chambres vacantes, car l’accueil de ces clients de l'industrie génère des revenus additionnels sous forme de réservations de chambres supplémentaires, de restauration et d'autres services tels que le spa et le room service.
La Suisse est, elle aussi, concernée par ce problème de rétention des employés et se devra de rivaliser avec l’Asie, qui elle proposera de nombreux nouveaux postes aux personnes souhaitant faire carrière dans l’hôtellerie. Toutefois, la Suisse peut miser sur un avantage comparatif de taille: sa qualité de vie. En effet, nous avons la chance d’avoir un cadre de vie exceptionnel dans lequel l’eau et l’air sont purs et où la sécurité est assurée. Cela nous semble tellement naturel, et pourtant c’est une réelle chance que beaucoup d’autres pays n’ont pas. Imaginez-vous être un manager talentueux travaillant en Chine ou en Californie, où il est parfois impossible de sortir ou d’aller courir à cause des pics de pollution et qu’un jour vous faites un voyage en Suisse lors duquel vous découvrez qu’il est possible d’avoir accès à l’eau potable pratiquement partout et que l’air qu’on y respire n’est pas pollué.
Avec trois villes suisses (Zurich, Genève et Bâle) dans le classement mondial des 10 villes où il fait bon vivre, la Suisse a des revendications légitimes pour attirer et retenir une main-d'œuvre talentueuse. L'environnement, la croissance économique, la stabilité, la sécurité et la qualité de l'éducation en Suisse sont autant d’arguments solides pour encourager un engagement à long terme des nouveaux talents.
Rémi Walbaum est directeur Innovation et Valorisation à l'Ecole hôtelière de Lausanne. Entrepreneur dans l'âme, pédagogue et défenseur des start-up, il a très rapidement saisi l'importance du numérique.