Gilles Dind, vous quitterez Suisse Tourisme à la fin du mois au terme de presque 20 ans d’engagement. Dans quel état d'esprit vous trouvez-vous?
Tout est encore assez abstrait. Lorsque l'on y consacre tellement d'années, ce travail finit par faire partie de vous. J'aurai besoin d'une phase d’adaptation. Je suis très heureux de cette nouvelle étape et l’accueille avec sérénité. C’est une décision mûrie.
Vous allez vous consacrer à un projet privé dans le secteur de l’accueil à Barcelone, là où vous résidez. Peut-on en savoir plus?
Ma femme vient de Barcelone, cette ville me plaît, j'avais envie d’y exploiter un logement touristique. Depuis ce printemps, je détiens une licence pour exploiter un Airbnb. Le marché de la location touristique est devenu très rare à Barcelone car très réglementé. Mais si l’on a la licence, cela fonctionne très bien et il est possible de l'exploiter toute l’année. Je souhaite construire sur la base de ce projet en sondant d'autres opportunités, pourquoi pas aussi en Suisse.
Depuis le 1er janvier 2022, vous occupiez la fonction de responsable des marchés occidentaux. Aviez-vous besoin de recentrer votre terrain de jeu?
J’aurai passé un an dans ce nouveau rôle et dix ans au sein de la direction de Suisse Tourisme. Ma nouvelle activité me permettra de toucher à l’ultraconcret. A 48 ans, j’avais envie de ralentir un peu, de changer de mode de vie, de voyager moins et de consacrer plus de temps à ma famille et au sport. Désormais, je laisserai les autres venir à moi. Ce projet me permet de rester en contact avec différentes cultures tout en pouvant m’impliquer dans des projets locaux.
«Ouvrir un marché est très gratifiant, une chance et l'une de mes meilleures expériences»
Gilles Dind, responsable des marchés Ouest chez Suisse Tourisme et membre de la direction
Revenons sur votre expérience. Quels ont-été les dossiers les plus énergivores?
Après trois ans à Paris pour Suisse Tourisme, on m'a proposé d'ouvrir le marché espagnol. C'était en juillet 2006. J'ai débarqué à Barcelone que je connaissais peu. Tout était à faire. Il a fallu chercher un bureau, engager une personne, mobiliser les partenaires. Ouvrir un marché est très gratifiant: une magnifique chance et l'une de mes meilleures expériences.
Parlez-nous des collaborations, pas toujours faciles, entre les marchés et les destinations...
Chaque région a des attentes mais parfois les budgets individuels sont trop petits pour en faire quelque chose d'intéressant. Même si certaines régions sont très proches géographiquement, elles peinent à mutualiser leurs moyens, souvent pour des questions d'organisation. Cela reste difficile à faire comprendre qu'un saucissonnage de campagne n'a souvent pas de sens si l'on veut toucher des grands marchés comme la France.
Vous avez mené de nombreuses campagnes marketing. Laquelle vous a le plus marqué?
J'ai apprécié travailler avec des ambassadeurs, hors des sentiers battus. En pleine pandémie, nous avons réussi à recruter Mike Horn, habituellement inaccessible et injoignable, car il était bloqué en Suisse. J'ai aussi eu un coup de chance avec le photographe Yann Arthus-Bertrand, qui avait besoin d'images pour son prochain film. Ses exigences de qualité étaient très élevées. Le projet intitulé «La Suisse vue du ciel» a débouché sur une exposition à Paris.
Avez-vous un regret? Un projet que vous n'avez pas pu réaliser?
Honnêtement, je n'éprouve aucun regret, ST m'a tellement apporté. Toutefois, si l'opportunité ne s'était pas présentée de remplacer Michel Ferla à Paris en 2013, probablement que j'aurais bourlingué encore un peu. L'idée d'ouvrir un marché dans un pays plus lointain m'aurait séduit.
Où se situe le plus grand potentiel de la Suisse?
Le fait d'avoir habité à Paris et à Barcelone permet d'avoir du recul. Je suis encore plus amoureux de la Suisse qu'il y a 20 ans! Notre pays offre une expérience relaxante, une nature intacte, de la fraîcheur en été. Lorsqu’on arrive en Suisse, on entre dans une bulle de sérénité. Nous devons bâtir l'avenir de notre tourisme sur cet argument.
Comment percevez-vous les défis actuels du tourisme?
Je ne suis pas inquiet, si ce n'est pour l'économie mondiale et la force du franc qui constitue un vrai problème. L'un des défis consistera à garder le niveau de la clientèle européenne, qui représente 35% des nuitées.
De quoi a besoin le tourisme suisse aujourd’hui?
De mieux se fédérer afin d'offrir une communication plus unie vis-à-vis de l'étranger. On peut aussi souhaiter que les professions liées au tourisme soient davantage valorisées.
La Valaisanne Corinne Genoud pour succéder au Vaudois Gilles Dind
[IMG 2] Corinne Genoud rejoindra au 1er janvier 2023 la direction de Suisse Tourisme et sera la nouvelle responsable des marchés Ouest. Elle sera chargée de planifier et de réaliser les objectifs des marchés suivants: Suisse, Amérique du Nord, Brésil, Royaume-Uni et Irlande, Italie, France, Benelux, Espagne et Portugal. La Valaisanne travaille depuis près de 30 ans pour l'organisation nationale de marketing. L'actuelle responsable des marchés nordiques à Stockholm a aussi dirigé les marchés du Royaume-Uni/Irlande et des Pays-Bas.