Selon les chiffres les plus récents publiés en novembre par l’Office fédéral de la statistique concernant la période 2018-2021, seuls 23,9% des élèves genevois se sont engagés dans une voie d’apprentissage CFC après l'école obligatoire, soit le taux le plus faible de toute la Suisse (voir tableau comparatif). Or, compte tenu de la démographie, les besoins en main-d’œuvre – dans l’hôtellerie-restauration comme pour un grand nombre de métiers techniques – se feront cruellement sentir dans les 10-15 années à venir, quand ce n’est pas déjà le cas.
Symbole de cette volonté de promouvoir l’apprentissage, le nouveau centre Spark, lancé par la CIEPP, la caisse de pension de la Fédération des Entreprises Romandes (FER) de Genève, entre ces jours-ci en fonction et sera officiellement inauguré début mars. Ce véritable «campus des métiers», situé à Plan-les-Ouates, accueille désormais sur plus de 34 000 m² de locaux les cours interentreprises (CIE) de nombreuses filières genevoises.
Installées au premier étage de l’établissement et exploitées par l’association Hôtel et Gastro Formation Genève, les deux cuisines (8 postes chacune) de la filière hôtellerie-restauration doivent accueillir leurs premiers apprentis dès la semaine prochaine. «On compte beaucoup sur l'ouverture de ce nouveau centre, dont les équipements sont exceptionnels de modernité et d’ergonomie. J’espère que ce très bel outil contribuera à un regain d'intérêt pour l’ensemble de nos CFC hôtellerie-restauration», déclare Laurent Patrelle, directeur du 3 étoiles Tor Hôtel à Genève et membre du comité de la Société des Hôteliers de Genève (SHG), en charge de la formation professionnelle. «De notre côté, en tant qu’hôteliers, nous devons proposer plus de places d'apprentissage dans l’hôtellerie et la communication hôtelière, reconnaît-il. C’est aux employeurs de faire comprendre que notre métier est passionnant et riche de potentialités.» Dans ce contexte, il espère que le nouveau CFC Gestionnaire en hôtellerie-intendance, issu de la fusion du CFC Gestionnaire en intendance avec celui de Spécialiste en hôtellerie, «permettra aux hôtels genevois de proposer davantage de places d’apprentissage et plus fréquemment». La première volée de cette nouvelle filière commencera les cours au mois d’août 2024.
La formation professionnelle offre d’excellentes perspectives d’emploi.
Anne Hiltpold, Conseillère d'Etat de Genève, en charge de l'instruction et de la formation
La conseillère d'Etat confiante pour le secteur de l'hospitalité
Publiés en décembre dernier par l'Office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue (OFPC) du canton de Genève, les chiffres des contrats d'apprentissage pour 2023 étaient une belle surprise: 2570 contrats AFP (attestation fédérale de formation) et CFC (certificat fédéral de capacité) signés en 2023 contre 2347 en 2022, soit une hausse de 9,5%. «Je veux faire comprendre à nos jeunes que la formation professionnelle est une très bonne voie pour arriver sur le marché du travail. Elle ouvre d’excellentes perspectives d’emploi, souvent supérieures à des formations plus générales», commente Anne Hiltpold. La conseillère d’Etat genevoise, élue l’année dernière à la tête du Département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (DIP), a fait de la valorisation de la formation professionnelle l’une de ses priorités. «Notre souhait est d’être à l’écoute des entreprises, car c’est dans leur intérêt de disposer d'une relève de qualité. Mais c’est donnant-donnant, il faut aussi qu’elles s’engagent et forment plus, même si l'on est sur le bon chemin», prévient la magistrate, qui se montre par ailleurs confiante pour le secteur de l’hospitalité. «Genève est une ville internationale, avec une tradition hôtelière prestigieuse, un grand nombre de restaurants et une grande école hôtelière que nous soutenons. C’est un secteur qui a de l'avenir.» Les associations professionnelles attendent désormais beaucoup du centre Spark. Dispensés jusqu’alors dans les locaux de l’Etat, la plupart des CIE auront désormais lieu à Plan-les-Ouates. «Cela représente un changement fondamental. Les entreprises vont organiser les cours selon leurs besoins et ceux du marché, et gagner en autonomie», se réjouit Franck Sobczak, directeur du département de la formation à la FER, et qui a piloté le projet Spark initié en 2018. «L’image de la formation professionnelle à Genève est en train de changer, et c’est tant mieux, mais on doit poursuivre nos efforts», ajoute Laurent Baechler, responsable de la formation professionnelle à la FER. «Peu à peu, le milieu enseignant prend conscience que le jeune a autant de chances de réussir par une voie ou par une autre et qu’on doit lui laisser le choix», relève-t-il.
En automne dernier, l’Ecole hôtelière de Genève (EHG) a invité une centaine de conseillers d’orientation afin de leur montrer le campus et leur présenter l’étendue des carrières offertes dans ce secteur. Dans le même esprit, plusieurs classes du cycle d’orientation sont venues en novembre visiter les lieux, accueillies par des apprentis témoignant de leurs expériences. «Nous lançons une semaine découverte pour les 15-18 ans qui se tiendra début juillet, pendant laquelle ces jeunes découvriront chaque jour une thématique différente de nos métiers», explique Duncan Robertson, directeur Vente et Marketing de l’EHG. Avant d’ajouter: «Si vous voulez avoir un couteau suisse en matière d’employabilité, étudiez l’hôtellerie-restauration. Vous avez tellement de compétences transférables que le monde du travail est à vous.»
Alain-Xavier Wurst