Enfant, j’adorais l’histoire d’un vieux monsieur de mon village qui grâce à son abonnement général allait chaque jour manger dans un buffet de gare différent.
Même si les beaux buffets de gare patrimoniaux disparaissent comme peau de chagrin, le charme et la liberté accolés à ce qui se nomme désormais le Swiss Travel Pass subsiste et fait rêver les touristes étrangers pendant quelques jours. «La Suisse en train, c’est possible», écrit le Guide du Routard. Le Swiss Grand Train Tour mis en vedette par Suisse Tourisme dans sa campagne annuelle propose des trajets exceptionnels dans des trains panoramiques. Mais les habitants de ce pays trouvent aussi réconfort dans des lieux plus discrets comme la salle d’attente de la gare de Bienne, son ambiance boisée, ses fresques de Philippe Robert et ce slogan: «Je ne connais pas vos petites minutes.» On vend des kilomètres de trajets féeriques, alors que le bonheur se situe parfois dans l’attente.
Etudiant, je découvris la façon dont le train partant de Fribourg surgit d’un tunnel pour embrasser Lavaux. Les CFF pourraient proposer un produit de la région que l’on traverse, en l’occurrence un verre d'un joli Chasselas.
Un de mes professeurs très rigoureux devenait un autre homme lorsqu’il s’engageait pour la rénovation du vieux vapeur «Neuchâtel» sur le lac, il retombait en enfance. Lorsque l’on prend le train à crémaillère pour monter de Montreux aux Rochers-de-Naye, on vibre de ses secousses et on comprend pourquoi Claude Nobs aimait tant le jazz et les trains miniatures. Le Grand Train Tour se raconte à la plus belle des hauteurs, celle de l’enfance.
Alexandre Caldara est Journaliste au Cahier français.