«En mars-avril, mon taux d’occupation avoisine généralement les 55 à 60%. A la mi-mars, ce taux atteignait 8 à 10%, représentant une perte de chiffre d’affaires de 85%. Aujourd’hui, mon hôtel est vide.» Marie Forestier annonçait lundi le cœur lourd face aux médias avoir décidé le matin même de fermer son établissement 3 étoiles de La Tour-de-Paix, après avoir bouclé le restaurant deux jours plus tôt. La directrice de l’Hôtel Bon Rivage, par ailleurs membre du comité exécutif d’HotellerieSuisse, figurait parmi les premiers hôtels à prendre cette décision. Mais depuis, les annonces se succèdent. De Genève aux stations valaisannes, autant les petits que les grands établissements, ils sont de plus en plus nombreux à opter pour la fermeture. Même si le Conseil fédéral autorise l’ouverture des hôtels, mais pas de leur restaurant.
«Avant, on parlait d’annulations, aujourd’hui, il n’y a plus aucune activité», partage à son tour Stefano Brunetti, président des hôteliers lausannois et directeur de l’Hôtel de La Paix. Dans son établissement, les longs corridors sont effectivement déserts, la réception est inoccupée, on entend un bruit d’aspirateur au loin. L’hôtelier n’hésite pas à parler d’un «tsunami» pour les 40 hôtels qu’il représente. «Dans les prochaines heures et jours, 90% des collaborateurs de l’hôtellerie se trouveront à l’arrêt, soit l’équivalent de 1800 personnes. Les pertes de chiffre d’affaires sont estimées à un million de franc par jour pour Lausanne.»
Son de cloche similaire à Genève: «Les compteurs tombent petit à petit à zéro. J’estime le taux d’occupation à 10% sur la destination à ce jour [mardi]», indique Thierry Lavalley, président des hôteliers genevois et directeur du Fairmont Grand Hotel Geneva. «Je n’ai jamais vu la ville comme ça: ces hôtels plongés dans le noir, ces restaurants fermés font penser à un couvre-feu. C’est une situation très triste.»
Le Beau Rivage, l’Atrium Airport Hotel (tout juste inauguré) ou encore le Warwick font partie des établissements genevois ayant notamment décidé de fermer. «Nous n’émettons pas de consignes à ce niveau-là, cette décision appartient à chaque hôtelier en fonction aussi de son propriétaire», poursuit Thierry Lavalley. Sur la Riviera, Le Montreux Palace, le Swiss Majestic, le Grand Hotel du Lac et L'Helvétie ont aussi fermé.
En Valais, le Conseil d’Etat avait décidé lundi de fermer tous les hôtels. Une décision finalement annulée par celle du Conseil fédéral: «Nous regrettons ce manque de coordination, réagit Patrick Bérod, directeur de l’Association hôtelière du Valais. Si on veut éviter la propagation du virus, les hôtels doivent fermer.» La plupart des établissements, autant en plaine qu'en stations, ont déjà opté pour cette mesure, suite à la fermeture des remontées mécaniques ce week-end. Patrick Bérod estime toutefois que certains hôtels doivent rester ouverts, du moins en partie, pour héberger ceux «qui n’ont nulle part où loger» comme les travailleurs détachés, les techniciens, le personnel de la grosse industrie ou des touristes ne pouvant rentrer chez eux.